Aux quatre coins du mondeLa Galerie des cinq continents

Construit sous le Second Empire par Hector Lefuel pour accueillir les sessions parlementaires, le pavillon des Sessions devient Galerie des cinq continents en 2025. Dans ses salles vastes et lumineuses, à l’architecture sobre et épurée conçue par Jean-Michel Wilmotte, se noue un dialogue entre les cultures du monde par-delà les frontières et les époques.
Des chefs-d’œuvre venus du monde entier
La sélection d’objets qui s’y trouve réunie reflète la diversité des collections publiques françaises. Sont mises en relation, sur un socle d’égalité, des œuvres provenant du musée du quai Branly-Jacques Chirac, du musée du Louvre et du musée national des arts asiatiques Guimet, ainsi que du musée national de la Marine, de la Bibliothèque nationale de France, du musée d’Aquitaine et du musée de Boulogne-sur-Mer. Un dépôt exceptionnel de la République fédérale du Nigeria complète cette présentation de plusieurs millénaires de création humaine.

« Les Chefs-d’œuvre naissent libres et égaux »
Créées sur les cinq continents, ces œuvres présentent une grande diversité de parcours. Si certaines ont été produites pour être collectionnées, d’autres ont eu plusieurs vies ou fonctions avant d’entrer dans les musées : objets de dévotion, de culte ou de rituel, privés ou publics, symboles de pouvoir, de prestige ou d’autorité, éléments d’architecture.
Ces parcours révèlent la profondeur et la complexité de l’histoire de la circulation des objets, en Europe ou vers l’Europe. Les musées s’efforcent de les retracer en s’appuyant sur les sources disponibles et l’état de la recherche.

Des cultures en dialogue
Les échos entre les œuvres, les cultures et les continents qu’elle rend possible font résonner quelques enjeux fondamentaux de l’existence humaine : naître, mourir, croire, manifester l’autorité, asseoir le prestige, orienter le sort, expliquer le monde, se concilier les éléments, passer d’un monde à l’autre.
La Galerie des cinq continents éclaire ainsi le pouvoir accordé aux objets dans le temps long des sociétés et des civilisations, en révélant la diversité des représentations, des fonctions et des valeurs qui leur sont associées devant des questionnements partagés. A travers les liens, les perspectives et les apparentements qui se tissent entre les œuvres, c’est une pluralité de rapports au monde qui se dessine.
Galerie d'œuvres
Quelques chefs-d’œuvre du musée du quai Branly-Jacques Chirac présentés dans la Galerie des cinq continents

Sculpture de grade turu kuru
1 sur 8
Des cultures en dialogue
Maternité / Vierge et l'Enfant
Une « maternité » dogon et une Vierge à l’Enfant espagnole, datant de la même époque, n’ont pourtant ni le même sens ni la même fonction. Mais en Afrique comme en Europe, ces deux sculptures d’une mère tenant sa progéniture sur les genoux expriment une même idée de protection, de lignage et de transmission.

Maternité
Attribuée au « Maître de Tintam »
Mali, région de Tintam
14e siècle
Bois, pigments
Musée du quai Branly - Jacques Chirac, 70.1999.9.3
Acquise sur place par Maurice Nicaud en 1954
Ancienne collection Hubert Goldet
Dation, 1999.
Le thème de la maternité renvoie à la fécondité et la descendance. Dotée d’un labret au niveau de la lèvre inférieure, la figure féminine esquisse un mouvement de la jambe pour stabiliser la position du bébé. Un crocodile sculpté sur le montant du siège évoque un clan, un lignage.
La couleur rouge, obtenue à partir d’ocre, est particulière à un groupe de sculptures anciennes de la région de Tintam.
Vierge et l’Enfant
Espagne, Aragon
Vers 1300
Bois polychromé (polychromie d’époque moderne)
Musée du Louvre, département des Sculptures, RF 2015-2
Entré dans les collections par achat en 2015. Morata de Jalón (comarque de Valdejalón, province de Saragosse, Aragon ?) ; collection Ernest Rupin (1845-1909) depuis 1896 ; vente, Paris, R.-G. Boisgirard, 1er avril 1960 ; vente, Paris, R. Le Fur et associés, 26 novembre 2014 ; galeries Gabrielle Laroche et Bresset.
Dans les statues de la Vierge Marie portant l’Enfant Jésus, l’accent est mis souvent sur le rapport affectif entre la mère et son jeune enfant, comme dans une famille quelconque. Pourtant, des éléments symboliques rendent cette image plus complexe. La Vierge tient une rose, dont l’Enfant touche un pétale. La fleur et le geste sont une allusion à la future Passion du Christ quand il sera adulte et annoncent les souffrances de l’Enfant et de sa Mère.
Aelius César / Sculpture de grade turu kuru
L’exercice de l’autorité consiste à commander et à obtenir obéissance. À travers les siècles, les sociétés ont inventé des formes, des objets et des images pour légitimer cette autorité, la limiter ou la contester. La statue d’Aelius Caesar ou l’« homme bleu » du Vanuatu rendent visible un pouvoir établi et une position au sommet de la hiérarchie sociale.

Aelius César
Italie, Cumes ?
136 – 138 après Jésus-Christ
Marbre
Musée du Louvre, département des Antiquités grecques, étrusques et romaines, Ma 1167
Achat, 1861. Ancienne collection du Marquis Campana.
Cette statue provient de la collection du marquis Giampietro Campana (1808-1880), banquier et grand amateur d’antiques dans l’Italie du 19e siècle. Sa fortune lui permet de rassembler des œuvres issues de fouilles ou d’achats sur le marché de l’art. Condamné pour malversations financières, sa collection est confisquée. En partie acquise par l’empereur Napoléon III (1852-1870), elle entre au Louvre en 1862.
Adopté en 136 après Jésus-Christ par l’empereur Hadrien en vue de lui succéder, le sénateur Lucius Aelius César meurt subitement en 138. Cette statue-portrait le représente demi-nu, dans une pose et selon un modèle anatomique empruntés à la statuaire grecque. L’épaule gauche et le bas du corps sont drapés dans un long paludamentum (manteau militaire). Ce mode de représentation, qui révèle l’anatomie idéale, exprime le pouvoir. La statue a dû être sculptée lors du rapprochement d’Aelius César avec l’empereur, ou peu après son décès.
Sculpture de grade turu kuru
Sculpteur(s) ni-vanuatu
Vanuatu, île de Malo, village d’Asakavasa
19e siècle
Bois pigments
Musée du quai Branly – Jacques Chirac, 71.1938.42.8
Don Gabriel Gomichon des Granges, 1935
Cette sculpture fut réalisée pour célébrer l’accès du chef Kana Supé à un grade élevé. La famille du chef la vendit plus tard au planteur Jean Jacquier qui la céda à l’avocat Gabriel Gomichon des Granges. Il en fait don aux collections nationales lors du passage du bateau la Korrigane à Port Vila (Vanuatu)en 1935.
Cette sculpture représente un homme de rang élevé à Malo, comme l’indiquent les attributs de pouvoir, les coquillages sculptés qu’il arbore au poignet gauche et l’ornement de coiffure. Les reliefs en partie haute et les gravures sur l’abdomen évoquent des mâchoires de porcs, sacrifiés pour l’obtention du grade que la statue commémore. Erigée devant un édifice cérémoniel, elle incitait au respect.
Vase canope au nom du directeur de cave à vin Ouadj-renpout / Tête de sculpture moai
De l’Égypte ancienne au Mexique préhispanique, masques funéraires, reliquaires et stèles accompagnent le défunt dans l’au-delà ou perpétuent son souvenir parmi les vivants. Face à la mort, ces objets et les rituels qui leurs sont associés traduisent une quête commune : donner un sens à la fin de l’existence terrestre.

Vase canope au nom du directeur de cave à vin Ouadj-renpout
Égypte
Nouvel Empire (vers 1550-1069 avant Jésus-Christ)
Calcite (albâtre égyptien)
Musée du Louvre, département des Antiquités Égyptiennes, N 2973
Inscrit sur l'inventaire en 1857, peut-être dans les collections en 1827 (Drovetti n° 207 ?).
Les vases dits « canopes » conservent les viscères momifiés. Ils personnifient les « Quatre Fils d’Horus » : Amset (homme/foie), Doua-moutef (chien/estomac), Hâpi (babouin/poumons), Kébeh-sénouf (faucon/intestins). Les viscères étaient en effet prélevés et momifiés à part, remplacés dans le corps par des sacs de natron, sorte de soude qui favorise la dessiccation des chairs.
Tête de sculpture moai
Sculpteurs rapa nui
Nord de Rapa Nui, Anakena, (île de Pâques, Chili)
11e – 15e siècle
Roche volcanique
Musée du quai Branly – Jacques Chirac, 71.1935.61.1
Mission Métraux-Lavachery, 1934.
L’acquisition d’une tête de moai destinée à rejoindre le musée d’Ethnographie du Trocadéro fait partie des objectifs de la mission scientifique « Métraux-Lavachery » (1934-1935), co-financée par la France et la Belgique. Son « enlèvement », selon les mots de l’ethnologue suisse Alfred Métraux (1902-1963), a lieu sur le site cérémoniel d’Anakena, au nord de l’île, en 1934 avec l’accord des autorités chiliennes.
Il existe plusieurs types de grands moai de pierre à Rapa Nui. Beaucoup se dressaient autrefois, alignés côte à côte sur des plateformes bâties sur le rivage. Le regard tourné vers l’intérieur des terres, ces statues monumentales veillaient sur le clan dont ils évoquaient la généalogie. D’autres moai demeuraient sur les pentes du Rano Raraku, le volcan dont la pierre était extraite et qui semble avoir constitué en lui-même un sanctuaire.
Vishnu / Dionysos
Le sacré relie les femmes et les hommes aux puissances surnaturelles auxquelles ils croient. Qu’il s’agisse d’un Dieu unique créateur de l'Univers dans le judaïsme, le christianisme ou l’islam, d’un panthéon de plusieurs divinités dans les religions des Égyptiens, des Grecs et des Romains de l’Antiquité, ou bien encore d’esprits ou de forces vitales, le rapport au sacré donne lieu, sur tous les continents, à la création d’images et d’objets.
On compte parmi ces images et ces objets des représentations du divin lui-même, parfois sous des traits humains, comme c’est le cas des sculptures du dieu grec Dionysos, du Christ des Rameaux ou des divinités hindoues Vishnu, Bhudevi et Lakshmi.

Vishnu
Inde. État de Tamil Nâdu, Thirubhuvanai
16e–17e siècle
Bronze
Musée national des arts asiatiques – Guimet, MG 11394, MG 11395, MG 11396
Don du ministère des Colonies (avant 1904).
Vishnu tient dans ses mains supérieures deux de ses attributs distinctifs, la conque (shankha) et le disque (chakra). Ce dernier élément, que l’architecte divin Vishvakarman façonna avec des rayons superflus enlevés au soleil, est une redoutable arme de jet, lumineuse et brûlante. Le dieu est ici figuré en compagnie de ses deux épouses, Lakshmî, déesse de la Fortune, et Bhûdevî, la déesse Terre.
Dionysos
Libye actuelle, Cyrène
Deuxième quart du 2e siècle après Jésus-Christ
Marbre
Musée du Louvre, département des Antiquités grecques, étrusques et romaines, Ma 1778
Achat, 1852, mission J. Vattier de Bourville.
Dionysos, fils de Zeus et de la mortelle Sémélé, est le dieu du vin et du théâtre dans le monde grec. Cette statue fragmentaire le représente jeune et imberbe, vêtu d’une nébride (peau de cervidé) particulièrement fine. Son bras droit était levé et sa main posée sur la tête, dans une attitude de délassement empruntée aux modèles statuaires d’un autre dieu majeur du panthéon grec, Apollon.
L'œuvre en scène
Pour aller plus loin
Pour en savoir plus sur les œuvres exposées dans la Galerie des cinq continents, rendez-vous sur le site des collections du musée du quai Branly.

Découvrir aussi

Le gardien de l'art égyptien
Crypte du sphinx

À la découverte des Arts de l’Islam
Cour Visconti - Actuellement fermé








