Œuvre Personnage masculin

Cette petite figurine d'homme, taillée en ivoire d'hippopotame, provient de Safadi, dans le Negev (Israël). Elle est l'illustration parfaite du travail des ivoiriers vers 3500 av. J.-C. Le style naturaliste, emprunt d'une certaine raideur, comme d'ailleurs un bon nombre de ces statuettes d'hommes ou de femmes représentées souvent nus, donne naissance à un art très original. Leur rôle pourrait être religieux ou mis en relation avec quelque concept de fertilité.

Une cachette creusée dans le sol d'une habitation souterraine

Trouvée en 1958 par Jean Perrot, au cours de la huitième campagne de fouilles à Beersheba, cette figurine taillée dans de l'ivoire d'hippopotame a été découverte sur le sol d'une habitation souterraine, peut-être un atelier d'ivoirier. Cette statuette semble avoir été fabriquée sur place comme en témoignent les outils retrouvés : une "dalle-établi" en calcaire, une pointe de cuivre à manche d'os et une masse perforée en hématite qui aurait pu servir de volant à un foret.

Un art original

L'homme, représenté de face, nu ou portant un simple pagne avec un étui pénien, se tient debout dans une attitude hiératique. La tête, ovoïde, semble "rentrée" dans les épaules. Les oreilles, relativement discrètes ne constituent qu'une petite excroissance. Les yeux ronds et creux étaient sans doute incrustés à l'origine d'une perle imitant l'iris. Le nez, long et droit, traverse tout le visage. La bouche et le menton sont pratiquement inexistants. La présence d'une dépression sur le sommet du crâne laisse supposer que ce réceptacle était prévu pour accueillir une perruque ; d'autres statuettes, découvertes à cette époque, portent des petits trous permettant l'ajout de barbes et autres attributs postiches, destinés à souligner le système pileux du visage et, parfois, de certaines parties du corps. Le corps est élancé. Les épaules sont anguleuses et étroites. Les bras, maigres, reposant le long du corps, sont détachés de celui-ci et viennent s'appuyer sur les hanches : d'un point de vue technique, la découpe a été faite par une série de perforations réalisées probablement à l'aide d'une pointe en cuivre comme celle retrouvée à côté de l'objet. Les mains sont comme "cassées" sur le bassin, ce qui accentue davantage l'impression de raideur. Le personnage porte un étui phallique et un pagne qui dissimule mal le sexe dont la présence très marquée est encore renforcée par des incisions pratiquées dans l'ivoire. Les jambes, courtes, ont été séparées par sciage de l'ivoire à l'aide d'un outil en silex ; les pieds sont à peine ébauchés.

Un style naturaliste

Cette oeuvre illustre bien le style naturaliste de bon nombre de statuettes réalisées au Chalcolithique dans cette région. D'un point de vue stylistique, elle est à rapprocher des statuettes produites en Égypte pré-dynastique, en particulier à l'époque de Nagada vers 3500 av. J.-C. Le rôle de ces figurines, dont d'autres exemples sont attestés à la même époque, pourrait être cultuel ou à rattacher à quelque concept de fécondité.